Pas de patron! (Partie 1)

Cet article est le premier d’une série de trois portant sur l’holacratie. Les deux premiers billets sont une introduction au mode organisationnel des entreprises qui promeuvent l’autogestion; j’aborde d’abord la structure organisationnelle et par la suite les procédures. Pour le troisième billet, je vous donne mon opinion sur comment cette façon de faire s’opère en entreprise. Est-ce réaliste et réalisable, et est-ce accessible pour tous ?

Partie 1

Comme promis, aujourd’hui, je vous parle de l’holacratie, qui est un modèle de gestion où le pouvoir décisionnel est partagé entre

tous les individus d’une même organisation. C’est tout le contraire des structures hiérarchiques que l’on a l’habitude de voir où les décisions se prennent du haut vers bas. En effet, dans une organisation qui fonctionne en autogestion, tous ont un pouvoir décisionnel, et plus encore !

J’entends déjà certaines personnes me dirent : « Ça doit être le chaos ! Pas de boss pour prendre les décisions ? » Eh bien non ! Bien au contraire. Il est démontré qu’une organisation où personne ne détient le pouvoir sur une autre est en fait beaucoup plus performante, car elle forme un tout. Dans cette première partie, je vous explique plus en détail la structure que prend une telle organisation.

Le secret est dans le support !
D’abord, on ne peut pas improviser une telle structure car, en effet, le chaos régnerait. S’assurer d’avoir le support nécessaire au préalable est la clé du succès ! Pensez à une équipe de travail de dix personnes qui prend ses propres décisions. Certainement, des gens ne seront pas en accord et des conflits émergeront peut-être. Que faire ? Les équipes qui s’autogèrent sont formées sur les styles de communication, ce qui diminue de beaucoup les conflits et les discussions sans fin. De plus, chaque personne apprend à gérer les conflits et à utiliser des ressources telles qu’un médiateur ou un facilitateur, disponibles pour les accompagner (non pas pour régler le problème à leur place, attention). L’équipe a donc des outils et des façons de faire pour prendre la meilleure décision possible pour l’ENTREPRISE, et non pour l’ego de chacun. Bref, avant d’instaurer l’autogestion dans un milieu, il faut s’assurer d’avoir les compétences pour que ce soit fructueux. Pour cela, il faut des outils, des formations et des gens aptes à apporter un support.

La confiance avant tout !
Lorsque l’on regarde la structure organisationnelle des entreprises qui fonctionnent en mode autogestion, c’est très atypique. Tout d’abord, elles ont rarement un organigramme, il n’y a pas de postes proprement dits, un technicien en architecture, par exemple, ni de descriptions de tâches (avec ce fameux « toutes autres tâches connexes »), pas de comité exécutif ni de directeur d’équipe. « Voyons ? Les gens font quoi ? Ils doivent passer leur temps à jaser au lieu de travailler s’ils n’ont pas de descriptions de tâches pour leur dire quoi faire ! » Encore une fois… NON ! Affirmer cela, c’’est stipuler que les gens sont irresponsables. Or, dans ce type d’entreprise, la prémisse est que les employés sont des personnes raisonnables en qui on peut avoir confiance. Lorsqu’une personne sent qu’on lui fait confiance, elle ne voudra pas décevoir, se sentira responsable de son travail et du résultat, et sera fière des réussites.

Eh oui, dans ce type d’entreprise, Georges, qui manœuvre la machine à coupe peut, du jour au lendemain, devenir magasinier, car il a détecté un besoin qui profitera à l’ensemble de ses collègues et à l’entreprise. Il fait donc le tour des équipes pour connaître leurs besoins en matériel et procède aux achats pour faire une économie de gros. Ou encore Hélène, qui développe les produits, peut décider de voyager autour du monde pour savoir ce qui se fait comme nouveauté et revenir pour former ses collègues sur les nouvelles tendances. Pas besoin de demander la « permission », pas d’évaluation de poste ou du salaire (nous discuterons du salaire dans la deuxième partie), on passe immédiatement à l’action, ce qui permet d’être très fluide et de s’adapter rapidement aux réalités de l’entreprise.

En résumé, les gens sont responsables de faire bénéficier leurs connaissances et compétences à l’entreprise et à leurs collègues, afin d’atteindre le but fixé. Le rôle d’une personne peut évoluer en fonction des besoins organisationnels. C’est l’ensemble du groupe qui décidera si le rôle joué est pertinent ou non. Par exemple, s’il advenait que plus une seule personne ne participe aux rencontres de formation d’Hélène sur les nouvelles tendances, elle aurait à se trouver un nouveau rôle, elle pourrait retourner au développement de produits ou encore s’orienter vers un autre besoin non comblé.

La gestion de projet pas comme on la connaît !
Êtes-vous bien assis ? Vous allez être chamboulé ! Dans de telles organisations, il n’y a pas de délai ni de budget par projet, pas d’échéancier ni d’approbation nécessaire, ce qui permet de sauver énormément de temps. Les équipes se forment naturellement et ces entreprises n’ont pas la prétention de croire qu’une seule et unique personne peut prendre toutes les décisions par elle-même dans un contexte où il y a autant d’informations complexes. On mise sur l’intelligence collective. Comment priorise-t-on ces projets ? Encore une fois, des volontaires se nomment à la réalisation du projet et des mécanismes sont mis en place pour s’assurer que les projets à réaliser se mettent en branle.

Avec l’un de mes clients, nous avons commencé graduellement ce mode de fonctionnement. Nous avons mis en place un cahier de projets. Lorsque les employés ont une idée ou voient une opportunité d’amélioration ou de développement, ils l’indiquent dans le cahier. Les collègues indiquent leur nom à côté lorsqu’ils désirent participer à ce dernier. Pour le moment, c’est le gestionnaire qui établit les priorités, avec la collaboration de son équipe, en fonction de l’ampleur des projets, de son plan stratégique et de son budget. Ce qui est gagnant, c’est que les employés se sentent davantage impliqués et écoutés. De plus, plusieurs projets ont été réalisés facilement, sans beaucoup de moyen et de temps, au bénéfice de l’efficacité de l’entreprise. Les employés sont bien placés pour proposer des projets qui auront un impact positif sur l’organisation, car ils ont une bonne perspective.

Innovation, créativitéL’holacratie, c’est ça. Plus de flexibilité, de la confiance et l’intelligence collective ! Un tel mode de fonctionnement apporte beaucoup de bénéfices : l’efficacité par l’autonomie, un sens de liberté et des responsabilités, la motivation de faire toujours mieux, la coopération, le sentiment d’appartenance, la possibilité de laisser place au leadership des individus selon les situations. Évidemment, ce n’est pas donné à tout le monde de mettre en place une telle structure. Il faut, comme tout, s’assurer d’avoir les bons ingrédients pour que le gâteau prenne, mais nous en parlerons plus tard.

Dans le prochain billet, j’aborderai davantage le mode de fonctionnement holacratique et suivra par après mon opinion sur cette façon de faire en entreprise.

Pour ceux qui ont de l’intérêt sur ce mode de fonctionnement, je vous recommande l’excellent livre de Frederic Laloux, Reinventing Organizations. Dans son livre, monsieur Laloux cite plusieurs entreprises qui ont adopté ce mode de gestion et va beaucoup plus en profondeur que le résumé que je vous fais ici. C’est un livre que je recommande chaudement à tous ceux qui souhaitent en apprendre plus sur l’humain au cœur de l’entreprise, la gestion et la performance organisationnelle.

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